jeudi 7 février 2019


A l'origine de La Gazette en 2015


Discours de remerciement lors de la remise du FNR Special Award 16.10.201

Merci Här Président,
No souvill Komplimenter fir meng Persoun, erlabt mer och a
Kompliment un Iech ze adresséiren. Den FNR huet sech no engem
zimlech kaoteschen Start am Johr 1999 permanent verbessert, an
daat besonnescht ënnert ärer Présidence. Bravo.

Den FNR ass waat ee nennt eng Organisation apprenante déi haut
aus onser Innovatiounslandschaft nët méi eraus ze denken ass. Dât
ass och de Mérite vun der ganzer FNR’s Equipe, ënnert der
professioneller Leedung vum Marc Schiltz, engem unerkannten
Universitär.
An och e groussen Merci u meng Famillgen, déi mech zennter dem
Ufang ënnerstëtzt an och supportéiert huet wann et därs Gudden e
bësgen zevill gouf.

Léif Frënn,

dëss Unnerkennung mëcht mer besonnescht Freed, well ech hunn
neischt gefroot, neischt geflüssert, së koum vum selwën, ech hat
mer absolut neischt erwaart.
Eigentlech misst ech och dem Letzeburger Wieler merci soen, deen
no 30 Johr politescher Monotonie de Wiéssel an der Recherche- an
Innovatiounspolitik erméiglecht huet.

Monsieur le président,

vous m’avez remis le Spécial Award du FNR.

Selon Wikipedia, « An award is something given to a person, a
group of people, or an organization to recognize their excellence in
a certain field; [it is] a certificate of excellence ».
Je veux partager cette reconnaissance officielle avec tous ceux qui
de l’extérieur ou de l’intérieur du Centre Henri Tudor se sont battus
depuis plus de 30 ans pour faire avancer l’innovation, la recherche
et l’enseignement supérieur au Luxembourg. A qui le pouvoir
politique et ses followers n’ont jamais fait de cadeaux.
Je veux dédier cette marque de reconnaissance du FNR à tous
mes compagnons de route du Centre Henri Tudor, en première lieu
à Jean de la Hamette qui a été président du Conseil
d’administration du Centre Tudor de 1987 à 2007, qui restera pour
toujours LE président du Centre Tudor. Merci cher Jean, nous te
devons beaucoup.

J'ai eu le bonheur d’être entouré d’excellents collaborateurs,
motivés et capables de concevoir et de mettre en oeuvre dès 1987
une organisation atypique de recherche pour l’innovation, bien
avant l’apparition au début des années 2000 de la dénomination
RTO (Research and Technology Organisation).

En 2006, le Centre Tudor a été accepté et reconnu comme RTO à
part entière par EARTO, l’association d européenne des RTO crée
en 2001 Au début on me posait souvent la question: quel modèle
étranger avez-vous copié? Aucun, répondais-je fièrement.

Bien plus tard, j’ai découvert un ancêtre lointain le Kohsetsushi qui
fut introduit au Japon au début du 20e siècle pour soutenir de façon
décentralisée et non académique le développement de l’industrie et
des PME en particulier… Qui l’eut cru?
Revenons à 1985. Il y avait ceux qui partaient du principe qu’il faut
d’abord expérimenter avant de structurer avec modération, il y avait
ceux qui voulaient dès le départ sur-structurer une recherche
publique inexistante. Ce clivage est resté pour longtemps dans
notre histoire. Dans un petit livre blanc, un groupe de scientifiques
luxembourgeois avaient proclamé en janvier 1984: « Il ne s’agit pas
de mettre en place un decorum impressionnant.. Les nécessités de
l’heure exigent plutôt d’accorder une priorité à l’enseignement
[supérieur] et à la recherche… »

En 1987, nous avons déjà évité le pire. Sous la pression du ministre
de l’éducation, découvrant en 1985 sa compétence sur la
recherche, le gouvernement envisageait de créer 22 Centres de
Recherche Publics et de nombreuses superstructures dont un
fonds national pour la recherche.

A peine 8 mois après le vote de la loi de mars 1987, le Centre
Tudor était opérationnel. Dès l’année suivante, il a commencé à
formuler ses trois principes fondateurs, en les affinant au rythme de
ses plans de développement successifs:

- être une entreprise d’utilité publique largement autonome géré
comme une entreprise privée dont les valeurs sont sont les
suivantes qualité, transparence et accountibility (obligation de
répondre de ses actes), équilibre interne des pouvoirs, mobilité des
chercheurs son seulement pour éviter le vieillissement collectif,
mais aussi pour essaimer, pour renforcer le tissu socioéconomique,
introduction d’un système évolué de carrière et de
rémunération, réaliser un taux d’autofinancement de 50 à 60 %, en
1996 l’autofinancement avait même dépassé les 70 %, c’était
d’ailleurs beaucoup trop.

- pratiquer toutes activités utiles pour l’innovation sans exclusion a
priori: recherche doctorale et appliquée, support technologique,
incubation d’entreprises de technologies avancées intégrée dans
les réseaux de la recherche, formations liées à la recherche et à
l’innovation, veille technologique;

- de veiller à la nature coopérative de toutes les activités. Les
centres de ressources sectoriels introduits dès 1979 ont permis de
structurer de façon durable le partenariat.
Manifestement ces principes ne plaisaient pas aux plus
conservatrices de nos parties prenantes. Certains ministres,
fonctionnaires et syndicalistes patronaux voulaient nous pousser
dans le coin de la recherche fondamentale assortie d’une
planification détaillée et quinquennale.
Nous avons évité le pire, de justesse, mais nous avons pu contrer
avec succès les attaques les plus perfides.

Je pourrais ainsi continuer la litanie des « nous avons évité le
pire ».

Concernant le spin-out du Technoport, nous avons mis en échec un
scénario catastrophe écrit par deux ministres mal inspirés et
quelques fonctionnaires. Quand en 2003 le gouvernement a voulu imposer un modèle
archaïque d’université à la française et y intégrer de force les CRP,
nous avons formulé notre avis sans qu’on nous le demande. A cette
époque, tout ce qui avait le malheur d’être contraire au bon plaisir
de La Madame, comme disaient ses fidèles serviteurs, passait
simplement à la trappe. La liste était longue.

La cerise sur le gâteau, c’était le projet Belval, décidé lors de la
tripartite sidérurgique de1996, il y a près de deux décennies. Il
faudra un jour écrire son histoire pour éviter aux générations futures
qu’elle ne se reproduise. Le projet de cité des sciences concoctée
en secret par le Fonds Belval et l’université avait pour but de
claquer d’emblée les 1200 millions d’euros envisagés par le
législateur comme plafond à ne pas dépasser. Les noms retenus
pour les fameuses Maisons de Belval témoignent de la folie des
grandeurs, d’un amateurisme prétentieux et de la volonté d’en
terminer une fois de plus avec les CRP. Je cite: maison du savoir,
maison Leonardo,maison du recteur, maison de la vie pour les
sciences du vivant , maison de l’atome pour les technologies des
matériaux, maison du nombre pour les technologies de l’information, maison
money & paragraphes pour les juristes et les économistes, pas mal,
maison de la cognition et une modeste maison de la Recherche
publique pour confiner les administratifs de tous CRP. Je vous jure
que c’est vrai! Il était prévu de disperser les équipes de recherche
des CRP dans l’anonymat de l’université. Tout cela sans aucune
concertation avec quiconque.

Les trois CRP de l’époque ont sonnée l’alarme 31 janvier 2006
dans une lettre commune au Fonds Belval et en copie au ministre
de la recherche qui a convoqué illico des réunions de crise pour
éviter un scandale public. En parallèle, le ministre des travaux
publics a mis en suspens les appels publics à concours pour
l’urbanisme et l’architecture de la première phase de construction.
De nouveaux consultants sont venues pour faire encore une étude,
la dernière. Et pour être bien compris, le gouvernement a décidé de
limiter le plafond des dépenses à près de 600 millions d’euros pour
l’ensemble. Une économie de 600 millions! Merci qui?
Il y a près de 40 ans, il y avait d’ailleurs une initiative citoyenne d’un
groupe de scientifiques luxembourgeois qui a permis de raison
garder dans un tout autre domaine et à une échelle bien plus
grande. De nos jours, on qualifierait ces scientifiques de lanceurs
d’alerte.

Quelles leçons pouvons-nous tirer de tout cela?

D’abord que les scientifiques ne sont pas tous des magouilleurs et
des profiteurs du système, loin de là! Que les acquis en matière de
recherche publique des trois dernières décennies sont
impressionnants malgré la faiblesse évidente de la gouvernance
politique, ce que l’OCDE avait déjà mis évidence dans son rapport
de 2006.

Dans le contexte de ce rapport, j’avais proposée la fusion des CRP
dans une structure fédérative unique, une espèce de Fraunhofer
Gesellschaft à la luxembourgeoise, dans le but de renforcer le
système d’innovation luxembourgeois. Face au pôle académique
de l’université, un pôle unique de recherche, de développement et
d’innovation, un grand RTO. Cette option reste d’ailleurs ouverte
avec la création des trois Luxembourg Institutes of quelque chose.
Lors de la séance du Conseil d’administration du CRP Tudor du 12
décembre 2011, j’ai réitéré de façon spontanée cette proposition. Le
gouvernement voulait mettre à jour la loi de 1987 sur la recherche
publique avec un minimum de nouveautés. La discussion de ce
projet de loi risquait de s’enliser et d’hypothéquer dangereusement
l’avenir des CRP. Ma proposition fut saisie comme une balle au
bond par les présidents des deux CRP prioritairement concernés,
Tudor et Lippmann. La suite de l’histoire ne fut pas délectable.

Les responsables n’avaient manifestement rien appris d’une autre
fusion chaotique en ses débuts, celle des quatre établissements
d’enseignement supérieur en 2003. Les nombreux dégâts
collatéraux auraient pu être évités dans les deux cas.

Pour le LIST j’espère qu’on pourra bientôt dire: nous avons évité le
pire.
Dans les deux cas on retrouve une loi universelle. La manie du
secret, le mépris affiché des collaborateurs, l’étouffement de toute
discussion critique et l’absence d’adhésion qui en résulte sont
absolument contraires à une bonne gestion de la recherche
publique. Et l’inverse est vrai aussi. La loi de 1987 a été précédée
par deux années de discussions contradictoires et de disputes
politiques parfois vives, elle a tenue la route pendant près de trois
décennies et produits de nombreux effets bénéfiques.
Dans le cas de la création du LIST, la concertation a été remplacée
par l’envoi de spadassins. Leur manie destructrice avait pour cible
prioritaire les nombreux acquis RTO des CRP et bien sûr les
excellents collaborateurs qui n’avaient rien à se reprocher. Hélas, le
monde de la recherche est plus subtil que le milieu des spadassins.
Sachez Messieurs que la recherche ne se gère pas comme une
armée secrète.

Le FNR a bien raison de traquer les cas d’inconduite au niveau
individuel du chercheur, le plagiat, le piratage, la publication de
résultas truqués, les titres académiques douteux.Les sciences du
vivant semblent les plus exposées à ce genre d’inconduite.
Cependant, le milieu de la recherche dans son ensemble,
gouvernance incluse, aurait intérêt à porter son attention sur les
inconduites systémiques, dont je viens d’esquisser quelques
exemples flagrants.

Ce thème constitue réellement une page blanche. Je pense à
l’abus d’argent facile, la communication abusive, les conflits
d’intérêts, les évaluations biaisées. Et les médias donnaient parfois
l’impression d’être sourds et muets.

Daat alles ass nët sou schlëmm, wéi soot de Putty Stein: Well mir
hu Geld, d’brauch sech keen ze drecken, d’brauch sech keen ze
quëtschen, d’Mënz pass doo, d’Freed kënnt noo. Bien vu!
La recherche a besoin de façon urgente d’une réelle gouvernance,
l’OCDE avait suggéré deux voies inégales: soit la création d’un
comité de haut niveau pour la recherche et l’innovation, soit une
restructuration profonde du système d’innovation. Ce fut bien sûr la
première voie qui fut choisie par le gouvernement en 2006. Fiasco
total et d’ailleurs prévisible. La deuxième voie fut empruntée en
Finlande, avec succès. Leur système d’innovation accorde une
importance égale à l’approche académique et à l’approche RTO.
La gouvernance de la recherche n’a rien à voir avec l’autorité
hiérarchique et les mesquineries administratives. Dans un système
d’innovation bien conçu, la bonne gouvernance consiste à le doter
de mécanismes auto-régulateurs, librement acceptés par les
individus et les organisations.

La relation contractuelle entre l’Etat et les établissements publics, la
démarche de qualité et l’instauration pour les chercheurs d’espaces
de liberté, de médiation et d’écoute sont les clés de voûte d’une
approche efficace.

Soyons clairs, la qualité c’est avant tout un état d’esprit, c’est
l’analyse critique des échecs et dysfonctionnements pour améliorer
de façon permanente le système. La non qualité, c’est la rustine ou
le tapis.

Le contrat de performance fixe les obligations des signataires et
constitue la référence pour l’évaluation de l’impact. C’est un contrat
de confiance, ce n’est pas un ensemble de clauses léonines
imposé par l’Etat, mais tout contributeur a le droit de savoir ce qu’il
a pour son argent.

C’est simple à dire, pas si facile à faire!

Här Staatssekretär,

mir setzen all ons Hoffnung op Iech, Dir hut alles waat e brauch fir
ze réüss.iren, Dir sit jonk, onbefangen an energisch, wann et muss
sinn kennt Der och Nee soen, an Dir hut och nach a gudde
Regierungsprogramm.

Bon vent à tous.

Merci fir d’Noolauschteren.

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